Témoignage de Guy Bergamini pour aveugles et malvoyants

Témoignage de Guy Bergamini


« Il n’y a pas de Dieu, il n’y a pas de Dieu » criait ma mère, folle de chagrin lorsque mon beau-frère est revenu de l’hôpital, annonçant la mort de ma jeune sœur Liliane, âgée de 11 ans, mon aînée de trois ans. Ce dimanche soir, une embolie l’emporta. Atteinte de leucémie, depuis plusieurs mois, la maladie a eu raison de sa jeunesse. Je la vois encore, assise sur son fauteuil roulant, les yeux révulsés, bégayant ses dernières paroles « je m’en vais, je vois Jésus, Jésus… » D’une certaine manière, j’étais content. Elle n’aurait plus à souffrir, pas seulement de la maladie qui la rongeait mais aussi de toutes les souffrances morales et psychologiques que notre père, alcoolique et violent, nous faisait tous souffrir.


Je n’ai aucun souvenir d’un moment de tendresse avec lui. Nous subissions fréquemment des coups, des agressions verbales, des insultes. La vie était dure, sans argent, et nous étions obligés de travailler dans une grande épicerie, après l’école, pour payer les crédits. Ma mère faisait des ménages. L’atmosphère de la maison se détériora davantage après la mort de ma sœur et ce, jusqu’au divorce de mes parents.

Nous vivions dans un quartier où nombre d’immigrés italiens habitaient. La plupart travaillaient comme mon père à l’usine Peugeot automobiles. Chaque samedi, la même rengaine, il mettait son costume, passait chez le coiffeur et commençait la tournée des bars et des cabarets de la ville. Combien de fois, tout jeune, j’allais la nuit le rechercher, ivre mort, effondré sur un trottoir.


Rapidement, à mon adolescence, la famille se disloqua. Après des démêlés avec la justice, mon frère aîné parti pour l’Algérie, dans les commandos de Marine. Pour ma part, la scolarité devient rapidement épique. Une vraie montagne russe. Dès l’âge de 14 ans, j’ai commencé à traîner, pas grand-chose ne m’intéressait sinon la musique des Rolling Stones, la marijuana et les filles. Pendant trois ans mon adolescence se passa dans la violence et la petite délinquance. La haine contre toute autorité ravageait mon cœur. Mon père en paya les frais, lorsqu’un soir, ivre et violent, il s’attaqua à moi avec un couteau. Ce soir là, j’ai attenté à ses jours et je suis parti de la maison pour toujours. Je vivais dans une petite chambre chez ma grande sœur et chez des amis.


A cette période, j’ai eu peur et je n’osais pas envisager mon avenir. Je vivais au jour le jour avec une bande de hippies, accroché à la drogue et à la musique. Je courrais de festival pop en festival, de pays en pays, en espérant aller un jour aux Indes.


Un rayon de soleil apparut sur ma route, lorsque pour la première fois, l’amour frappa la porte de mon cœur. J’avais un parcours de relations sexuelles mais l’amour m’était bien inconnu. Ce sentiment, pour moi, n’existait pas. E. une jeune immigrée, d’origine hongroise et serbe, s’attacha à moi. Malheureusement, il fallait compter avec une maîtresse insensible…la drogue. Rapidement, E. fut prise, elle aussi, dans ses filets et la descente fut vertigineuse. En quelques mois, sa santé, sa scolarité, ses relations familiales, se dégradèrent. Nous vivions dans l’angoisse et la dépression. La pensée de me séparer d’elle hantait mon esprit, la culpabilité me rongeait et je voulais mettre un terme à cette misère.


Nous étions en pleine crise, lorsqu’un soir d’été, pour la première fois, je levai les yeux vers le ciel. Il était splendide. Les étoiles brillaient dans une nuit magnifique et la paix habitait le cosmos. Un souhait est monté des profondeurs de mon être tout en me frappant la poitrine : « A si la paix qui là-haut pouvait être la dedans. ». Je vivais du slogan peace and love, mais je ne savais rien, ni de la paix ni de l’amour. Tout n’était que haine, amertume, douleurs, honte, violence.


Mon seul refuge était la drogue, et je ne voulais en rien, en cette fin de semaine de juillet, manquer le rendez-vous avec mon dealer. Le trafic était intense entre les frontières suisses et allemandes où j’habitais. Il nous fallait faire le plein. On ne « dealait » pas à cette époque avec aussi de facilité qu’aujourd’hui, mais à l’heure du rendez-vous, je n’ai vu pas l’ombre du dealer. Agacés, avec E. nous avons quitté les lieux pour marcher dans le centre ville et là, sur une place occupée par des dizaines de jeunes aux cheveux longs et guitares sèches, une femme en petit tailleur, s’approcha de moi et m’interpella avec ces paroles : « Jeune homme, Jésus vous aime. Vous vous appelez Guy et Il m’a envoyé ici pour vous. Il est le chemin, la vérité et la vie. » Des larmes coulaient sur ses joues. « Il vous aime, il est la réponse que vous cherchez depuis si longtemps. Il peut vous apporter la paix que vous cherchez dans votre monde de drogue. » J’étais stupéfait et nerveux à son égard mais ses larmes et ses paroles me touchèrent. Avant de la laisser sur place elle me glissa un morceau de papier où était griffonné son adresse accompagné de ces mots : quand tu veux.


Je trouvai mon dealer à l’endroit convenu en lui reprochant son absence que celui-ci contesta. En effet, on m’assura qu’il était bien là mais que ne l’avais pas vu. Bizarre ! Je compris plus tard, que Dieu, m’avait aveuglé pour ne pas rater un rendez-vous bien plus important.


Le 12 juillet 1972, en fin d’après-midi, nous nous sommes, avec E. retrouvés à l’adresse indiquée. Pendant les trois jours précédents et toute la journée, ces mots résonnaient en moi : « Jésus t’aime, Il est le chemin, la vérité la vie, la paix… » L’amour manifesté par cette femme me travaillait : Pourquoi pleurait-elle pour moi ? Quelqu’un pouvait-il m’aimer, moi, le délinquant, le haineux ?


Ce soir là j’ai découvert le message, l’amour inconditionnel et le pardon immense de Jésus. J’ai compris le sens de sa mort sur la croix. J’ai été brisé par son amour pour moi. « Quelqu’un m’avait tellement aimé qu’il avait préféré donner sa vie pour moi. ». A ses pieds, je fus convaincu, lavé et purifié. Une vie nouvelle, une régénération parfaite commença. La paix entra dans mon cœur pour la première fois de ma vie. Ce jour là, je suis devenu l’enfant d’un Père merveilleux.


Il me guérit instantanément des chaînes de la drogue. Sa puissance de vie triompha de ma haine, de mon amertume et de mon désir de mort. Jésus fit de moi une nouvelle créature. Combien de fois avais-je aspiré à être différent ? Combien de fois j’avais maudit ceux qui m’avaient donné la vie ?

Elisabeth trouva aussi le Berger de son âme. Tout ce que la drogue lui avait pris, le Seigneur de la vie le lui rendit. Sa santé s’améliora rapidement et malgré une intervention chirurgicale grave, qui devait la laisser stérile à cause des dégâts de la drogue dans ses organes, Jésus l’a guérie.

De l’abîme, Il nous a sauvés. Notre vie lui appartient pour toujours. Il l’a racheté à un si grand prix.


Notre seul message est celui-ci : « Jésus est venu chercher et sauver celui qui est perdu ».


Retour vers le menu